« Qui suis-je pour juger ... » ?

 

Beaucoup se souviennent de la phrase fameuse du pape François – « Qui suis-je pour juger les gays ?». Une phrase qui restera pendant de nombreuses années une sorte d'emblème de ce pape que l’on ne craint plus maintenant, même dans les milieux catholiques, non seulement de le critiquer, mais tout simplement de le traiter d'hérétique. Le métropolite Agafangel a écrit à juste titre que l'Église catholique avait sombré dans l'hérésie il y a déjà mille ans, mais aujourd'hui, avec ce pape, c'est comme si dorénavant elle n'était plus même chrétienne. Mais soyons clairs : il y a, bien évidemment, une grande masse, même si elle est de moins en moins nombreuse, de catholiques dignes de ce nom qui essaient de garder le contact avec la tradition, avec leur tradition qui, à bien des égards, a déjà péché par rapport à la tradition des temps apostoliques et à l’enseignement des Saints Pères. Toutefois, cette tradition était encore largement fondée sur l'enseignement chrétien, même s'il n'était pas toujours correctement interprété.

Dans les années soixante du siècle dernier eut lieu le concile de Vatican II, authentique brigandage, dont le but non caché était de démanteler cette Église catholique traditionnelle, en la mettant à bien des égards sens dessus dessous. La principale conséquence de ce triste concile a été le vide visible des églises et la déchristianisation complète des masses populaires que nous constatons aujourd’hui. La France, par exemple, qui pendant des siècles en Occident s'est enorgueillie du titre de "Fille aînée de l'Église", est aujourd'hui considérée comme l'une des nations les plus déchristianisées d'Europe, ce qui avait poussé le pape Jean-Paul II, lors de sa venue en France, à s'exclamer avec tristesse : "France, fille ainée de l'Église, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? ".

Vatican II a engendré une fraction de catholiques conscients qui n'ont pas accepté les réformes, ou, plus simplement, la révolution vaticane, et c'est ainsi qu'est apparue une masse relative de catholiques qui ont résolument refusé de suivre la voie de la trahison à ce qu'ils avaient toujours cru et suivi. Parmi eux, les plus conscients ont tout simplement créé une Église parallèle avec ses propres évêques, non reconnue par les autorités romaines. La politique du Vatican à l'égard de l'ensemble du mouvement traditionaliste a toujours été hostile, ce qui est tout à fait compréhensible : un catholique ordinaire, qu'il soit laïc ou dignitaire, peut-il contester la ligne papale, être en désaccord avec les décisions d'unConcile œcuménique“ et même avec le „Vicaire infaillible du Christ“, pour parler comme les catholiques ?

Au début ce furent des exhortations, qui par la suite se transformèrent en menaces, puis on en vint aux interdictions et même à l'excommunication pour les plus récalcitrants. Mais tout cela s'avéra finalement vain : la persécution d'une part, et la désintégration spirituelle de l'Église officielle d'autre part, créèrent un noyau solide de traditionalistes décidément intraitables, dont le nombre ne diminua pas au cours des années et parmi lesquels, au contraire, on pouvait noter un grand nombre de vocations, alors que les séminaires officiels attiraient de moins en moins de personnes prêtes à consacrer leur vie au service de l'Église.

Devant pareille situation, plusieurs tentatives infructueuses furent entreprises, tout d'abord par Jean-Paul II, pour ramener ces "brebis égarées" dans le giron de l'Église officielle. Son successeur, Benoît XVI, qui tout au long de son pontificat s'est efforcé de ramener son Église dans un cadre plus traditionnel, est allé encore plus loin que son prédécesseur dans l'espoir de surmonter le schisme avant qu'il ne s'enracine dans les nouvelles générations. À cette fin, il a levé l'excommunication qui pesait sur ceux qui n'acceptaient pas les réformes du concile Vatican II et a publié un motu proprio qui a mis tous les libéraux sur les dents, le Summorum Pontificum, qui rétablissait pour ceux qui le souhaitaient la messe tridentine en latin d'avant la réforme. Pour calmer tout le monde et ramener les mécontents à l'obéissance, il dut publier une lettre pastorale clarifiante, dans laquelle il exhortait les évêques à faire preuve de générosité en autorisant la célébration de la messe tridentine dans les diocèses, pour le bien de tous les fidèles qui en faisaient la demande. Ce motu proprio s'est avéré être un élément décisif pour désamorcer les tensions, et ainsi un calme relatif a finalement été atteint dans ce domaine.

Mais Benoît est parti et François est arrivé... L'une des premières préoccupations du nouveau pape a été de démanteler toutes les bonnes intentions de son prédécesseur, comme cela se pratique en politique, lorsque la droite est remplacée par la gauche et vice versa, mais n'est pas courant dans la conduite des affaires de l'Église, où il semblerait nécessaire d'adhérer à ce qui a été cru partout, ce qui a été cru toujours, ce qui a été cru par tous, et de s'en tenir à cette ligne de conduite. Cette formule d'or de saint Vincent de Lérins, qui permet de déterminer la vraie doctrine et la vraie conduite, est, le moins que l’on puisse dire, violemment piétinée par le pape révolutionnaire actuel, qui n'a pas peur d'enflammer une fois de plus les passions qui s’étaient assoupies. À l'instigation de François, une forme moderne de l'ancienne "controverse des Anciens et des Modernes" – en l’occurrence, savoir quelle messe célébrer, la catholique traditionnelle ou la réformée moderne – a été ravivée. Par son motu proprio "Traditionis Custodes", il abroge brusquement les droits accordés aux fidèles par le décret de son prédécesseur dans "Summorum Pontificum", et le rite réformé de la messe voulu par Vatican II est désormais le seul rite légitime de la messe romaine. Notez que "Traditionis Custodes" est entré en vigueur en juillet 2021, alors que le pape Benoît était encore en vie, un an et demi avant sa mort ....

Mais les querelles sur la messe ne sont pas le seul champ de bataille de François, et ce n'est pas le seul domaine il refuse obstinément de suivre ce à quoi, au moins dans son Église, "partout, toujours et tous" ont cru. En même temps qu'il lutte contre la tradition et les traditionalistes, il se bat constamment sur un autre champ de bataille : la promotion persistante des femmes dans la gouvernance de l'Église, ce qui, comme chacun le sait, est particulièrement contraire aux préceptes de l'apôtre Paul et à l'ensemble de la tradition de l'Église. Le nouveau pape ne reste pas inactif, il émet sans cesse de nouveaux décrets, des motu proprio, des constitutions apostoliques, des lettres apostoliques, autant de documents qu'il est impossible de suivre. En juin 2022, par exemple, il ratifie la constitution apostolique "Praedicate Evangelium", qui remplace la constitution "Pastor bonus" de Jean-Paul II. De l’avis des experts de l'Église cela témoigne d'une volonté claire de changement global de la part de ce chef de l'Église catholique aujourd’hui âgé de 85 ans. La clause la plus importante de la nouvelle constitution stipule que des laïcs et des femmes pourront désormais accéder aux plus hautes fonctions de la Curie, qui étaient jusqu'à présent exclusivement dirigées par des hommes, généralement par des cardinaux. Peu de temps après la publication de sa constitution, il avait déjà nommé plusieurs femmes à des postes de direction au Vatican.

L'impression générale qui se dégage de son activité est qu'il veut rester en phase avec son temps selon le fameux principe de l'aggiornamento, qui était la ligne directrice du concile Vatican II qui a porté les fruits que l'on sait dans l'Église catholique. Et lorsqu'on lui fait remarquer cela, il répond qu'il est temps de passer du concile Vatican II à Vatican III, ignorant clairement qui est le prince de ce monde, aux conditions et aux mœurs modernes duquel il cherche à adapter son Église. .…

Dans la société laïque d'aujourd'hui, les grands principes en vogue sont la lutte contre le "patriarcat", c'est-à-dire la position dominante des hommes dans la société, avec l'élévation simultanée du rôle et de la place des femmes, ainsi que les problèmes de toutes les prétendues "minorités", ou pour parler moderne – "diversités", avec une attention particulière pour tout ce qui concerne le LGBTisme. Ces notions destructrices sont précisément la préoccupation constante du pape François. Écoutons sa "théologie de la femme" : «L’Église est femme, si nous ne savons pas comprendre ce qu’est une femme, ce qu’est la théologie d’une femme, nous ne comprendrons jamais ce qu’est l’Église». Jusqu'à présent, les chrétiens pensaient que l'Église était le corps mystique et sacramentel du Christ, mais cela ne correspond pas au nouveau paradigme papal sur l'Église. Si nous suivons François, il apparaît que ni les Apôtres, ni les Prophètes, ni les res de l'Église n'ont compris, tout comme les chrétiens modernes ne comprennent toujours pas, ce qu'est l'Église. François a publié sa nouvelle révélation après la proclamation, en novembre 2023, d'un autre motu proprio intitulé "Ad theologiam promovendam", dans lequel il a clairement indiqué que sa tâche principale était précisément de changer le paradigme concernant l'Église, et qui se termine par ces mots lapidaires : «Tout ce que j'ai décrété dans cette lettre apostolique, transmise au moyen d'un motu proprio, je décrète que cela aura une force stable et durable, en dépit de toute disposition contraire». Étonnant, pourrait-on dire, qu’il n’applique pas le même principe aux écrits et décisions de ses prédécesseurs ! A la fin du même mois, devant les membres de la Commission théologique internationale, il résume ainsi ses pensées et son action : «Et vous vous demandez :à quoi mène cette discussion ? - A rendre l'Eglise moins masculine ». On ne sait pas encore si ses projets incluent l'ordination des femmes, mais cela correspond certainement à sa vision du monde.

Mais ce qui a le plus ébranlé la conscience des masses catholiques, au point qu'un grand nombre d'évêques, et même de conférences épiscopales entières, dans un certain nombre de pays ont ouvertement exprimé leur désaccord, c'est la déclaration doctrinale intitulée "Fiducia supplicans", sur la base de laquelle les prêtres catholiques sont désormais autorisés à bénir les couples de même sexe. .... Comme l'ont écrit de nombreux commentateurs - on ne peut qualifier cette décision autrement que de véritable fracture, surtout si l'on considère que la déclaration a été publiée par le Dicastère pour la doctrine de la foi, qui était autrefois l'Inquisition, et, comme le souligne le texte même de la déclaration, avec l'approbation du pape François.

Arrêtons-nous sur cette Congrégation pour la doctrine de la foi, comme on l'appelait encore il n'y a pas si longtemps, avant 2022, et qui est responsable de la stricte surveillance de la pureté de la doctrine et des mœurs, ainsi que du devoir de les sauvegarder partout dans le monde catholique. Les préfets placés à la tête de cette Congrégation sont, en règle générale, et tout naturellement, d'obédience strictement conservatrice. Ces dernières années, il s'agissait du cardinal Joseph Ratzinger, alias le futur pape Benoît XVI, des cardinaux William Levada, Gerhard Müller et, jusqu'au 1er juillet 2023, Luis Ladaria Ferrer, tous théologiens reconnus d'obédience traditionnelle. Le cardinal Ferrer, en mars 2021, c'est-à-dire hier, car cette question traîne depuis longtemps dans l'esprit de ce pape et trouble le peuple fidèle, avait écrit au nom de la Congrégation : «Il est illicite de donner une bénédiction aux relations ou partenariats, même stables, qui impliquent une pratique sexuelle hors mariage […] comme c’est le cas des unions entre personnes du même sexe». Ce qui était inacceptable il y a deux ans est donc devenu acceptable avec son successeur tout frais émoulu. Et là encore, il est intéressant de retracer la politique de gestion des ressources humaines du pape François, qui introduit systématiquement à tous les postes de responsabilité et dans les nominations de nouveaux cardinaux - les futurs électeurs de son successeur -, des personnages d'un esprit bien défini

Qui donc a remplacé le cardinal Ferrer à la tête de la Doctrine de la Foi et s’est vu en même temps confier la présidence de la Commission biblique pontificale et de la Commission théologique internationale il y a six mois à peine? Le nouveau préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi est donc aujourd’hui et depuis peu un certain Victor Manuel Fernández, peu connu et apparemment peu célèbre dans le domaine de la défense de la pureté doctrinale. Mais, en revanche, le nouveau préfet a connu une autre forme de célébrité dans le passé : lorsque son prédécesseur à ce poste particulièrement important était le futur Benoît XVI, le cardinal Ratzinger, la Congrégation pour la doctrine de la foi recevait des plaintes concernant "l'hérétique argentin" et ses publications, parmi lesquelles le livre pour les jeunes "Guéris-moi avec ta bouche. L'art du baiser", qu'il tentait de présenter comme une sorte de catéchisme pour les adolescents. Au total, il lui a fallu correspondre et se justifier avec des fonctionnaires du Vatican pendant plusieurs mois au milieu des années 1990, dans l'espoir de prouver qu'il n'était en rien un hérétique, mais un bon et vrai catholique.

Interrogeons-nous – comment un homme soupçonné il y a encore peu d’hétérodoxie a-t-il pu devenir le gardien de la pureté de la doctrine ? La réponse est simple : cet homme était un protégé de longue date du cardinal argentin Bergoglio, qui a défendu et promu son compagnon de route au fil de toutes ces années. Tout devient clair, notamment sa nomination en 2008 comme recteur de l'Université pontificale catholique d'Argentine. Une fois Bergoglio devenu pape en 2013, Fernández est élevé au rang d'évêque quelques mois plus tard. En 2018, il est nommé archevêque de La Plata, l'une des principales villes d'Argentine. Et dès que l'occasion se présente de le rapprocher de la Curie romaine, il se voit confier, le 1er juillet 2023, le plus prestigieux des dicastères, celui de la Doctrine de la foi, d'où il doit veiller à ce que les activités des autres structures curiales soient conformes aux conceptions doctrinales du pape, et enfin, le 30 septembre, François l'élève au rang de cardinal. Stupéfaits par cette avancée rapide de la carrière de Fernández et par tous ces changements dans la politique vaticane, les "camarades curiaux" de Fernández se rendent compte que le pape François a, en fait, confié les clés du Vatican à son protégé.

Mais revenons à l'essence même du scandale qui a mis en émoi l'Église catholique. Bénir les sodomites, sans les appeler à la repentance et à un changement de vie, n'est-ce pas une manière directe de légitimer le péché sodomite de la part des dirigeants du Vatican ? Est-il nécessaire de rappeler l'enseignement sans équivoque des Saintes Écritures, tant du Nouveau que de l'Ancien Testaments, à ce sujet ? Dieu n'envoie pas de bénédiction pour un tel péché, mais un châtiment terrible aux habitants de Sodome et Gomorrhe. Dieu n'a pas envoyé de bénédiction aux habitants de Sodome pour ce péché, mais une pluie de feu et de soufre.

Mais le pape Bergoglio pense différemment, allant presque jusqu’à faire porter le péché par Dieu Lui-même. En 2018, n’avait-il pas déclaré à un homosexuel : «Je me fiche que tu sois gay. Dieu t'a créé ainsi, Il t'aime ainsi, et je m'en fiche. Tu devrais être heureux comme tu es». Il s'agit d'une pensée plus qu'étrange allant à l'encontre des enseignements de l'Église et du Christ. Elle est non seulement incompréhensible et illicite, mais dangereuse pour les âmes qui, du point de vue de l’enseignement chrétien, souffrent de ce péché. Quel est l'intérêt de bénir des personnes qui ne veulent pas renoncer à leurs habitudes de péché et qui se refusent même à appeler le péché – péché ? En abrogeant les lois de Dieu et en voilant la conscience on empêche les gens de faire pour eux-mêmes la distinction entre l'état de péché grave et l'état de grâce divine. Pareille démarche empêche les gens de se repentir pour obtenir le salut qui purifie l'âme du péché. Le pape François, comme le cardinal Fernández, non seulement ne dénoncent pas la sodomie en tant que péché, mais ils la légalisent dans une certaine mesure, obligeant chacun à remplacer les lois de Dieu par leurs propres jugements hérétiques.

Certes, tout l'enseignement de l'Église et des Saints Pères nous enseigne à faire la distinction entre le péché et le pécheur, mais l'amour pour le pécheur s'accompagne simultanément d'un appel à la repentance, au renoncement au péché et à la condamnation du péché lui-même. Et le pape François, comme certains aiment à le dire, "couvre tout par l'amour" et la miséricorde infinie du Seigneur Dieu, c'est-à-dire qu'il couvre le péché en même temps que le pécheur. Mais il s'agit là d'un blasphème et de la prédication d'une fausse miséricorde : c’est assurer les pécheurs de la miséricorde absolue de Dieu, afin que les pécheurs ne se détournent pas de leurs péchés, puisque dans tous les cas ils seront pardonnés par le Seigneur tout miséricordieux. «Dieu t'aime tel que tu es» - une phrase que François aime à répéter, sans ajouter par ailleurs que Dieu t’appelle à modifier ta vie en renonçant au péché.

Nous voyons là clairement un faux enseignement sur la miséricorde divine. Il assure les pécheurs de la miséricorde absolue du Seigneur sans appeler les pécheurs à se détourner de leurs péchés, puisqu'ils savent d'avance qu'ils seront pardonnés par le Seigneur Tout-Miséricordieux : «Dieu t'aime tel que tu es». Si quelqu'un pense que nous parlons trop durement du pape François, écoutons ce que des personnalités catholiques parmi les plus en vue n'ont plus peur de dire ouvertement.

Le cardinal Müller, ancien préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi jusqu'en 2017, limogé par le pape notamment pour ne pas avoir accepté d'aller dans le sens d'une libéralisation de l'homosexualité, a déclaré que les bénédictions demandées étaient "blasphématoires" et, dans une interview à une publication américaine en novembre 2023, a accusé le pape d'hérésies. Quant au cardinal Robert Sarah, ancien préfet de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des Sacrements jusqu’en 2021, il est allé jusqu'à dire que «nous ne devons pas entrer en discussion avec "Fiducia supplicans", tout comme nous ne devons pas entrer en discussion avec le diable».

Néanmoins, le pape Bergoglio ne recule pas et n'a pas l'intention de reculer : pas à pas, il impose sa ligne dans toute l'Église appelant à la sollicitude pastorale et à l'obéissance, sans toutefois répondre aux objections sérieuses qui lui sont adressées. En janvier 2023, il a annoncé publiquement aux médias du monde entier que les évêques devaient se rééduquer dans leur attitude à l'égard des LGBTQ. Il est donc clair que "Fiducia supplicans" n'était pas une maladresse irréfléchie - tout a été fait délibérément et selon un plan prémédité.

Cependant, à peine quinze jours plus tard, face à la contestation véhémente d’un grand nombre, le cardinal Fernández fut contraint de calmer les gens et de tenter d'apaiser la polémique. Une note spéciale précise que les nouveaux droits accordés doivent être appliqués en fonction des circonstances et des conditions locales et souligne qu'il ne s'agit pas d'un "sacrement" mais d'une "bénédiction" et que l'enseignement de l'Église ne change pas, que les couples de même sexe n'ont toujours pas le droit de se marier. L'objectif de la note est clair : apaiser les catholiques qui le souhaitent en leur faisant croire que le document respecte bien l'enseignement de l'Église. Mais alors, pour quelle raison a-t-il été nécessaire de susciter toute cette agitation et quel sens y a-t-il d'accorder une bénédiction à des personnes qui n'ont pas l'intention d'abandonner la voie du péché ? Toutefois, pour qu’il soit clair pour chacun que la Déclaration ne condamne pas le péché de sodomie, il est précisé : «Il faut veillerà ne pas réduire l'importance des bénédictions...». Comprenez comme vous voulez !

Mais il serait profondément faux de dire que toute l'Église catholique et tous les fidèles catholiques se sont révoltés devant cette libéralisation explicite de leur Église en matière de couples de même sexe. La masse tiède des fidèles, à la remorque des forces mondialistes, a au contraire triomphé. Enfin, c'est fait ! Il n'est pas inutile d'offrir ici un extrait d'un journal si caractéristique de cet état d'esprit : «Un pape de son temps ! Un pape proche de ses fidèles, qui vient du sud et n'a pas les habitudes conservatrices de son prédécesseur. Il accompagne la société, la vraie société, dans ses divisions et son évolution».

Et de fait, Fiducia supplicans est cohérente avec toutes les déclarations du pape François du jour de son élection. Quiconque s'intéresse non seulement aux questions ecclésiastiques, mais aussi à la politique internationale, est en mesure de comprendre où se trouve la source de ces pensées. Dans les chambres et les assemblées des organisations internationales, se mène en silence un travail permanent. Le conflit entre les droits chrétiens de l'homme et l'agenda LGBT atteint des niveaux dangereux pour les chrétiens. Les débats récents lors de la 53e session du Conseil des Droits de l'homme des Nations Unies (juin-juillet 2023 à Genève) ont soulevé des inquiétudes légitimes quant à l'impact potentiel de l'application des normes LGBT aux religions. Le Conseil a publié un rapport soutenant que la liberté religieuse viole les droits des LGBT. Le rapport indique que les gouvernements devraient imposer des normes LGBT acceptables pour les milieux religieux et punir les chefs religieux et les organisations qui ne s'y conformeraient pas. Il suggère également que les États-membres des Nations Unies utilisent des responsables religieux favorables à la promotion de l'idéologie LGBT, imposant ainsi cette idéologie à toutes les religions.

Que chacun comprenne bien où le Conseil de l'ONU peut dès à présent trouver de tels leaders religieux favorables... Hélas, pas seulement dans la seule Église catholique. Comme nous le savons, de nombreux pays ont introduit des lois qui ne sont pas conformes à l'enseignement et à l'éthique chrétienne, mais comme on dit - Dura lex, sed lex ... Cependant, est-il nécessaire que les responsables religieux se transforment en propagandistes de telles idées ?

Le pape François, qui se posait en 2013 la question - qui suis-je pour juger les gays ? pourrait utilement ouvrir la célèbre Histoire de l'Église d'Eusèbe de Césarée, qui cite les paroles du pape Étienne Ier, martyrisé au milieu du troisième siècle sous Dioclétien : «Nihil innovetur, nisi quod traditum est», en d'autres termes — qu’il n’y ait pas d’innovation au-delà de ce qui a été transmis. Le pape François aurait pu et dû appliquer ce principe à tout son pontificat, hélas, il semble bien décidé à ne pas tenir compte des paroles de son grand prédécesseur.

 

Protodiacre Germain Ivanoff-Trinadtzaty