SERMON du 16-e DIMANCHE après la PENTECÔTE


Matines : Luc XXIV, 12-35
Liturgie : 2 Cor. VI, 1-10 ; Matt. XXV, 14-30
Gal. II, 16-20 ; Marc VIII, 34 – IX, 1



AU NOM DU PÈRE DU FILS ET DU SAINT-ESPRIT
Bien aimés Frères et Sœurs



Nous sommes en ce Dimanche, comme l’attestent tous les ornements de l’Église, dans ce temps béni d’après l’Exaltation de la Croix. L’Épître aux Galates, dans la péricope concernée montre catégoriquement que c’est par la foi en Jésus-Christ que l’homme est justifié. Mais, par les œuvres de la loi – l’apôtre, Juif lui-même, s’adressait à des Juifs – personne ne sera justifié. On peut faire, par la loi ou par d’autres prescriptions, des œuvres convenables, mais elles ne nous rendent pas justes devant Dieu. C’est par la foi en Jésus-Christ seulement que nous parvenons à cette exaltation suprême et à la vie éternelle. Je suis mort à la Loi, poursuit-il, afin que je vive en Dieu.

Mais le passage de Marc propre à ce jour est singulièrement précis et explicite ce qu’implique l’adhésion à la foi en Jésus-Christ : «Quiconque veut venir à moi, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive». Vous comprenez ce que cela veut dire : se charger de sa croix ? C’est tourner le dos aux facilités et aux jouissances du monde, et assumer la rigueur et la douleur, ce n’est pas facile, la tranquillité et une vie sans problèmes seraient notre vœu, mais le Christ notre Dieu précise : «Quiconque voudra sauver sa vie, la perdra, mais quiconque perdra sa vie pour l’amour de moi et de l’évangile, la sauvera» !

La vie chrétienne n’est pas un chemin semé de pétales de roses. Nous le savons même si c’est dur. Mais la fin de cette péricope est bouleversante : «Il en est qui sont ici présents, qui ne mourront pas sans avoir vu le règne de Dieu venir avec puissance». L’ascétisme est nécessaire, mais la consolation mystique est sans prix !

I – Dans le passage de ce jour de la Deuxième Épître aux Corinthiens, l’apôtre Paul évoque les fruits de la Grâce : puisque donc nous avons reçu la Grâce de Dieu, que ce ne soit pas en vain que nous travaillons ! Le Seigneur a dit : «Je t’ai exaucé au temps favorable et je t’ai secouru au jour du salut». Ce temps favorable est arrivé ! Ne donnons donc aucun scandale, soyons recommandables en toute chose comme d’authentiques serviteurs de Dieu. Soyons patients dans les épreuves et les afflictions, faisons-nous connaître en tout par notre douceur et notre charité. Ayons les paroles de la vérité et les armes de la justice. Glissant insensiblement à l’évocation de son expérience et de ses tourments, il dit : nous sommes tenus pour des séducteurs - les chrétiens n’ébranlaient-ils pas les fondements mêmes de la société païenne ? -, alors que, au contraire, nous sommes véridiques. On nous tient pour dépassés, comme voués à la disparition alors que nous vivons, comme «liquidés» par les persécutions – alors que nous subsistons, comme justement affligés alors que nous sommes dans la joie, comme misérables et sans importance alors que nous possédons tout !

Les chrétiens ne font pas de bruit, point d’esclandres, ils se bornent à pratiquer leurs vertus et cependant la plénitude de leur joie fructifie …

II – Cette fructification d’un comportement sage est au cœur de la péricope évangélique de ce jour. Il s’agit de la parabole – puisque le Christ enseignait fondamentalement par ces récits imagés – du maître qui, partant en voyage, confie une certaine somme d’argent à ses serviteurs. Ces attributions sont inégales selon les forces de chacun se borne à dire l’évangile. L’un reçoit donc cinq talents, un autre deux, un troisième un seul.

Le maître ne donne aucune explication et part. Dieu, de la même manière, ne donne pas d’explication à chaque homme qu’il dote inégalement de «talents» - et ici, il ne s’agit pas d’argent, mais d’aptitudes. L’un est porté vers la réflexion, un autre est un manuel plus versé dans les techniques, un autre encore a des aptitudes esthétiques ou artistiques : bref, vous avez eu des enfants, vous connaissez les hommes et les femmes, et dans ces diverses capacités, vous les reconnaissez.

Au bout d’un assez long temps – la vie, en effet, qui s’écoule –, le maître revient et demande des comptes à chacun de ces serviteurs inégalement dotés. L’existence s’est déroulée, pour chacun, travailleur ou insouciant, mais tous auront des comptes à rendre à Dieu à qui nous devons tout.

Les serviteurs comparaissent devant le maître.

Celui qui avait reçu cinq talents en rapporte cinq autres en plus : l’argent que tu m’avais laissé, explique-t-il, je l’ai placé, et il a fructifié. Le maître loue ce serviteur diligent. Tu as été fidèle en peu de choses et je t’établirai au-dessus de beaucoup : entre dans la joie de ton seigneur ! Il félicite pareillement celui qui avait reçu deux talents, qui les avait fait fructifier et qui en rapporte deux autres. Ils avaient inégalement reçu et ils sont également loués et récompensés. Dante, suivant des Pères de l’Église, explique en effet que les élus ont eu des grâces diverses, mais que tous sont également remplis à pleins bords – comme des vases de diverses dimension.

Paraît enfin le serviteur qui n’avait reçu qu’un talent, mais qui, au lieu de le faire travailler chez le changeur, l’avait enterré. Il rapporte ce talent unique et infructueux. «Je sais, explique-t-il, que tu es un homme dur et que tu récoltes où tu n’as pas semé et que tu recueilles où tu n’as pas répandu : voilà donc ton bien … ». Le maître lui répond : «Tu sais que je récolte où je n’ai point semé, que je recueille où je n’ai point répandu : tu aurais donc dû, comme tes compagnons, placer cet argent chez le banquier

Il fait ôter cet unique talent au serviteur paresseux et le donne à celui qui en a dix autres en disant : «On donnera davantage à celui qui possède et on enlèvera à celui qui a peu même ce qu’il a», et il fait jeter ce serviteur infécond dans les ténèbres extérieures où il y aura des pleurs et des grincements de dents.

Notre vie, vous le comprenez bien-aimés frères et sœurs, n’est pas un déroulement tranquille et sans but. Nous ne sommes pas en ce monde pour nous laisser vivre dans l’infécondité. Nous sommes sur la terre pour produire vertus et bonnes œuvres et pour gagner ainsi, dans la joie de notre Seigneur, LA VIE ETERNELLE.


AMIN

 

 

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