. SERMON de la VEILLE [et] de la THEOPHANIE


Vêpres du jour : 2 Tim, IV, 5-8 ; Evangile : Marc, I, 1-8

Vêpres du soir : 1 Cor. IX, 19-27 ; Evangile : III, 1-18

Bénédiction des Eaux : 1 Cor. X, 1-4 ; Marc : I, 9-11

Théophanie : Tit. II, 11-14 et III, 4-7 ; Matt. III, 13-17

 

 

AU NOM DU PERE DU FILS ET DU SAINT-ESPRIT

 

Bien-aimés Frères et Sœurs,


I – Dès cette veille solennelle, nous commençons la célébration de l’Illumination qu’est la Théophanie.

Il y a quelques jours, nous étions dans la joie de la Nativité – dont la clôture est néanmoins le 31/13). Nous avons à peine remarqué, peut-être, le 1/14 la Circoncision. De toute manière, c’était toujours de Jésus, tout petit enfant « né avant les siècles » qu’il s’agissait. Or, avec la Théophanie (dont nous engageons déjà la lecture aujourd’hui), c’est un Jésus adulte qui paraît : il avait trente ans ! Jean-Baptiste, nous disent des pères, ne le connaissait pas. Ils étaient apparentés, Jean-Baptiste avait tressailli dans le sein de sa mère lors de la Visitation de Marie, mais la vie ensuite les avait séparés. Ils n’habitaient pas au même lieu, Jean-Baptiste était devenu un ascète dans le désert, Jésus était un artisan. Ils ne se connaissaient plus, mais dès que Jésus paraît, Jean-Baptiste le reconnaît

Car on reconnaît toujours Dieu – en lui-même ou en ses saints –, bien-aimés, Frères et Sœurs ! quand Il nous visite.

Le Précurseur Le reconnaît, et il recule effrayé : « C’est plutôt à Toi de me baptiser ! ». Le Christ écarte cette protestation en lui disant : « Accomplissons ce qui est juste … »

C’est de la même façon que Jésus enfant avait été circoncis pour accomplir ce qui était juste, comme le disent les Pères, car c’est par la circoncision que l’enfant juif entrait dans la lignée et l’héritage d’Abraham. Mais, pour ce qui est du baptême d’aujourd’hui, rien dans l’ancienne Loi ne le prescrivait le moins du monde. Par sa parole, « accomplissons ce qui est juste », le Christ, en ce jour, fonde le baptême ! Tel est l’Evénement extraordinaire dont nous amorçons aujourd’hui la célébration, et, en cette soirée même, nous bénirons l’eau du Jourdain, sanctifiée par le Christ et que nous conserverons toute l’année.

II – Pour accomplir ce qui est Juste, le Christ entre Lui-même dans l’eau, et alors – nous l’entendrons dès ce soir et nous le répèterons demain car ces deux fêtes, la Veille et la Théophanie elle-même, sont imbriquées et les textes se recoupent et se complètent – alors LE CIEL S’OUVRE, le Précurseur et ceux qui étaient là, VOIENT L’ESPRIT sous forme de Colombe, venir au–dessus de Jésus, tandis que LA VOIX DU PERE lui rend témoignage, comme « au Fils bien-aimé en qui » Il a mis « tout Son amour ».

L’extraordinaire s’accomplit dans l’extraordinaire : le Baptême est fondé, et en même temps se produit l’Illumination, la Manifestation de la Trinité, la Théophanie du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

A l’ancienne Loi a succédé la Foi, selon l’expression de saint Paul, car, désormais, nous savons Tout !

Or, souvenez-vous-en aussi, Christ parle souvent du Père, Il parle également de l’Esprit « l’autre Consolateur », mais c’est  en ordonnant aux Apôtres d’évangéliser toutes les nations qu’Il dit explicitement le Nom de Dieu : « les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ».

III -  Merveille de l’Illumination ! Nous nous sentons submergés par cette Splendeur, mais nous-mêmes, dirais-je volontiers, nous nous sentons tout petits, nous ne savons que faire pour rester dans cette proximité, que devons-nous faire, nous, les apôtres en quelque sorte, pour porter ce message du Christ ?

Les textes des Epîtres, la prédication même de Jean-Baptiste, nous éclairent – sans nous désespérer ! – « Sois vigilant, dit l’apôtre à Timothée, endure les afflictions, remplis les devoirs de ton ministère … » et il évoque avec calme la fin de son propre service. A Tite, il écrit : « … qu’en renonçant à l’impiété et aux convoitises du monde … nous vivions dans la tempérance, la justice, la piété … » Au demeurant, Dieu seul nous sauve, « non à cause des œuvres, mais selon Sa miséricorde, par le baptême de la régénération et par l’action du Saint-Esprit … » Le Précurseur s’en prend à ses auditeurs et pénitents avec énergie : « Race de vipères !», mais ses exigences sont accessibles : « Que celui qui a deux vêtements en donne un, que celui qui a à manger donne à celui qui a faim … » Aux publicains il dit : « N’exigez rien au delà de ce qui est ordonné », et aux soldats : « N’usez point de violence, mais contentez-vous de votre paye … » Saint Paul raconte comment il se met à la portée de ceux qui l’écoutent, avec ceux qui sont sous la Loi aussi bien qu’avec ceux qui n’en ont point, « me faisant tout à tous » … « Afin, ajoute-t-il, ce qui est plus préoccupant, d’en sauver au moins quelques-uns » … Et il rappelle que tous les athlètes courent, « mais un seul remporte le prix ». Certes, dit-il encore, tous nos ancêtres ont marché dans le désert, ils ont tous mangé la manne, bu l’eau du Rocher qui les suivait et qui était le Christ, … Mais la plupart d’entre eux, tombèrent morts dans le désert …

Soyez vigilants, en somme, ascétiques selon votre possibilité, voire au delà. Imitez, autant que vous le pouvez, le saint Précurseur qui, Lui était vraiment un ascète.

Or de même pour nous, en la veille de la Théophanie, l’église prescrit le jeûne – dur, huile et vin seulement sans poisson …

L’ascétisme est nécessaire toujours, mais, pour les chrétiens, comme nous le constatons aujourd’hui même, il aboutit à la rencontre bienheureuse. L’ascétisme se conclut en Mystique.

Tel est le message, mystérieux et fort, lumineux, de cette grande fête !

 

AMIN