La Foi du Centurion

 

 

« Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit; mais dis seulement une parole, et mon serviteur sera guéri. » (Matthieu 8:8)

Frères et sœurs bien-aimés en Christ,

Ces paroles, que nous venons d’entendre, devraient résonner en nous comme un éclair de vérité. Elles jaillissent non pas de la bouche d’un prophète, ni d’un apôtre, ni même d’un fidèle juif… mais d’un centurion romain, d’un païen, d’un homme d’armes, d’un représentant d’un pouvoir d’occupation.

Les faits se passent à Capharnaüm, en Galilée. La Judée, humiliée, est soumise à l’Empire romain. Les soldats étrangers, païens, circulent librement dans les villes saintes. Et pourtant, c’est l’un de ces soldats, un officier responsable de cent hommes, qui vient vers Jésus — avec respect, avec compassion, et avec foi.

C’est un homme de pouvoir. Il donne des ordres, et on obéit. Mais face au Christ, il ne vient ni avec arrogance, ni avec autorité. Il vient comme un mendiant, mais un mendiant dont la foi va jusqu’à toucher même Dieu.

Ce centurion, remarquons-le, ne commence pas par une prière. Il n’impose rien, ne réclame rien. Il dit simplement :« Seigneur, mon serviteur est couché chez moi, paralysé, et il souffre terriblement. » (Matthieu 8:6). Il expose la douleur, présente la réalité, sans essayer de manipuler le Christ. Il se contente d’exprimer la situation. Et cette simplicité, cette confiance silencieuse, fait déjà acte de foi.

Le Seigneur, qui venait d’enseigner les foules, qui avait passé la journée à guérir, à marcher, ne répondit pas avec hésitation. Il dit : « J’irai, et je le guérirai. » (Matthieu 8:7). Ce détail nous enseigne beaucoup. Car même fatigué, pressé par les foules, le Christ est prêt à marcher, à venir, à servir.

Il vit ce qu’Il avait déjà dit dans le sermon sur la montagne : « Si quelqu’un te force à faire un mille, fais-en deux avec lui. » (Matthieu 5:41). Cette parole, frères et sœurs, n’est pas seulement pour les prêtres, mais pour tous ceux qui portent le nom de chrétiens. Le Christ se rend disponible pour nous. Il ne choisit pas les heures, il ne regarde pas qui on est, il n’exige pas de mérite. Il est Amour en mouvement.

Mais c’est là que surgit l’éclat de la foi du centurion. Il aurait pu dire : « Viens, je t’emmène. Je t’accueillerai dignement. » Mais au contraire, il s’abaisse jusqu’à dire : « Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit. » (Matthieu 8:8). C’est une honte féconde, une lucidité spirituelle. Il reconnaît en Jésus une sainteté qui dépasse toute dignité humaine. Il n’a pas étudié la Torah, il n’est pas Juif, mais il voit ce que les docteurs de la Loi ne voient pas. Et plus encore, il déclare : « Dis seulement une parole, et mon serviteur sera guéri. » (Matthieu 8:8). Quel acte de foi ! Il comprend, beaucoup mieux que d’autres, que le Christ n’a pas besoin d’être présent physiquement pour agir, que la puissance de Sa parole suffit.

Chers frères et sœurs, cela ne vous rappelle pas l’histoire de  la femme cananéenne, une autre étrangère, à qui Jésus dira : « Femme, ta foi est grande. » (Matthieu15:28) ? Le centurion, lui aussi, reçoit ce témoignage du Seigneur : « En vérité, même en Israël, je n’ai pas trouvé une foi aussi grande. » (Matthieu 8:10)

Et que se passe-t-il ? Le serviteur est guéri sur-le-champ. Pas de toucher, pas de déplacement, pas de miracle spectaculaire. Une parole. Et la santé est rendue, pas de la manière dont les médecins nous guérissent, mais de la manière dont Dieu Seul peut le faire. Le centurion n’avait pas besoin de preuves. Il avait la foi. Et Dieu a agi.

Aujourd’hui encore, le Christ agit ainsi. Mais trouve-t-Il encore cette foi ?

A présent, beaucoup demandent des preuves, veulent voir des miracles, exigent des réponses immédiates. Mais souvent, nous prions sans vraiment croire, ou nous voulons croire sans nous abaisser. Le centurion, lui, a cru avant d’avoir vu, et a reçu sans même avoir demandé. Frères et sœurs, c’est cette foi qu’il nous faut retrouver. Une foi humble, une foi qui écoute, une foi qui ne commande pas à Dieu, mais lui fait confiance même dans le silence. Et cette foi naît dans l’humilité, dans l’amour pour les autres, et dans la confiance absolue dans la puissance de la Parole du Christ.

À chaque préparation pour la communion, nous lisons cette parole. Dans la prière de Saint Jean Chrysostome avec foi et amour nous lisons : « Seigneur, mon Dieu, je sais que je ne suis pas digne, ni préparé pour que tu entres sous le toit de mon âme … » Et le miracle se produit. Le Christ entre en nous. Il guérit notre âme. Il fait de nous Ses serviteurs. Aujourd’hui, frères et sœurs, faisons silence en nous. Présentons-Lui simplement notre douleur, notre faiblesse, ou celle d’un proche. Et croyons, humblement, qu’une seule parole du Seigneur peut suffire. Qu’Il nous donne la foi et l’humilité du centurion, et la paix que donne la confiance en Lui. Amen.

 

Prêtre Zhivko Zhelev